Un député veut favoriser les «logeurs solidaires»

24hArticle de 24 Heures du 1er avril – Lise Bourgeois

« Les dispositifs sociaux de location chez des particuliers méritent d’être creusés, estime Julien Eggenberger »

Le socialiste Julien Eggenberger est sensible à la crise du logement. Il observe que la pénurie d’appartements, qui touche tout un chacun, rend les possibilités d’habitat quasi impossibles pour les plus démunis comme les migrants, les bénéficiaires de l’aide sociale, voire les étudiants. Dans un postulat qu’il a développé lors de la dernière séance du Grand Conseil, il constate que les menues solutions comme la location d’une chambre chez le particulier sont, en plus, à la peine.

«Or, plaide-t-il, la situation est tellement tendue que nous ne pouvons pas nous permettre de renoncer.» Le député a dans le collimateur l’expérience pilote de logement solidaire de la Ville de Lausanne, destinée à des bénéficiaires du RI, et celle de l’EVAM, ouverte aux migrants. «Les essais actuels ne semblent pas très concluants, écrit-il dans son postulat. Pourtant ces différents projets ont pour vertu de favoriser des rencontres improbables, le lien social et l’intégration.»

Julien Eggenberger constate plusieurs difficultés sur lesquelles il demande au Conseil d’Etat de se pencher: «Beaucoup de retraités qui habitent de grands appartements seraient prêts à louer une chambre, reprend-il. Mais, s’ils touchent les prestations complémentaires, ce qui est le cas de passablement de gens de la génération actuelle qui n’a pas toujours un deuxième pilier, le revenu de leur loyer vient en déduction de leurs PC.» Autre aspect, les logeurs sont soumis à des exigences bien helvétiques. Par exemple, une salle de bains séparée doit être mise à disposition, même lorsqu’il s’agit de n’accueillir qu’une personne seule.

A Lausanne, le service social a démarré une expérience pilote en juillet 2014, qui proposait de mettre en contact des logeurs et des bénéficiaires du RI. Six mois plus tard, trois baux étaient conclus, sous sa supervision. Mais aujourd’hui, la Ville a tiré la prise: «Nous nous sommes rendu compte que ça n’était pas faisable, rapporte Michel Cornut, chef du Service social Lausanne (SSL). Les ressources qu’il faut mobiliser pour ce dispositif sont disproportionnées. Nous avons remarqué que passablement de personnes étaient prêtes à sous-louer une chambre, mais après, il faut garantir que tout marche bien.»

De son côté, l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM) a lancé début 2015 une opération d’accueil des migrants chez les particuliers, en collaboration avec l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR). Là aussi, de nombreux citoyens se sont annoncés. Une famille de Lully et son jeune protégé érythréen ont d’ailleurs fait les gros titres l’an passé. Mais l’avancée de ces rencontres entre logeurs et réfugiés se fait à pas de fourmi. A tel point que l’EVAM planche actuellement sur un nouveau «concept», comme le précise la porte-parole Evi Kassimidis.

Faciliter les contrats

Pour Julien Eggenberger, il faut désormais se placer du point de vue du logeur et se demander comment faciliter les contrats. Son postulat mélange à dessein les différents accueils de réfugiés ou de RIstes, car, dit-il, il ne faut pas «mettre les deux publics en concurrence». Dans son optique, le Conseil d’Etat devrait pouvoir démêler l’écheveau et produire un rapport sur les «logeurs solidaires» avec, idéalement, de nouvelles idées: «Il faut gratter, il faut chercher!» Pour l’heure, le texte doit être examiné par une commission ad hoc qui dira s’il lui semble intéressant de donner cette mission au gouvernement. Le plénum tranchera ensuite.

 


Petite précision: Je n’ai pas proposé cette idée en ayant la Ville de Lausanne dans le « collimateur », mais bien pour continuer à explorer d’autres modalités de logements solidaires. Je n’ai aucun doute sur la bonne volonté des services sociaux dans l’expérimentation relatée dans l’article.