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Les Vaudoises et Vaudois paieront-ils les amendes des banques?

Interpellation déposée le 24 juin 2014.

Les activités aventurières de nombreuses banques suisses à l’étranger ont contribué à provoquer une importante crise économique et nécessité l’engagement d’argent public. Elles ont aussi provoqué des réactions des autorités de ces pays et abouti, parfois, à des amendes conséquentes. Aujourd’hui, ces mêmes institutions bancaires prétendent utiliser les zones grises de la législation fiscale afin de déduire ces montants, provoquant des baisses considérables de recettes fiscales.

Dans sa réponse à la conseillère nationale socialiste Suzanne Leutenegger Oberholzer, le Conseil fédéral a estimé que, dans le domaine des impôts sur le revenu et sur le bénéfice, il ne fait aucun doute que les amendes fiscales ne constituent pas une charge justifiée par l’usage commercial et, par conséquent, ne sont pas déductibles (loi sur l’impôt fédéral direct et la loi sur l’harmonisation des impôts directs). Le postulat invitant le Conseil fédéral à légiférer a été accepté.

Toutefois, le Conseil fédéral différencie la question des « amendes » en tant que sanction financière prévue par le droit pénal, et dont la déductibilité n’est pas autorisée au niveau fédéral, des sanctions financières infligées à titre de prélèvement sur le bénéficie n’ayant pas de but pénal et qui sont, en principe, déductibles des impôts à titre de charges justifiées par l’usage commercial. Sur ces deux points, les politiques suivies par les administrations fiscales cantonales varient.

La jurisprudence dans ce domaine est encore maigre. Les différents jugements connus concernent essentiellement des personnes physiques et contestent la déductibilité. Dans le domaine des personnes morales, l’administration fiscale zurichoise attend un jugement du tribunal administratif cantonal.

De plus, les stratégies d’écrêtage du bénéfice et de transfert de charges entre entités d’un même groupe entrent aussi en ligne de compte. En résumé, les marges de manœuvres à disposition des banques sont vastes, elles se font au détriment des recettes fiscales des collectivités publiques et il est évidemment absolument inacceptable que les contribuables suisses et vaudois doivent payer pour les démarches irresponsables et illégales commises par nos banques à l’étranger.

Dans le cadre de cette interpellation, les questions suivantes sont posées :

  1. Le Conseil d’Etat partage-t-il l’opinion qu’il est choquant que des sanctions dues à des agissements illicites soient déductibles à titre de charges commerciales ?
  2. Quelle est la politique suivie par l’administration cantonale des impôts concernant la déductibilité des sanctions à caractère pénal encourues par les banques ? et pour les autres personnes morales ?
  3. Quelle est la politique suivie par l’administration cantonale des impôts concernant la déductibilité des autres sanctions encourues par les banques ? et pour les autres personnes morales ?
  4. Quelle est la base légale sur laquelle s’appuie cette pratique ?
  5. Est-ce que des procédures judiciaires qui permettraient de sécuriser la pratique sont en cours ?
  6. Cette pratique est-elle comparable à celle des autres cantons ? Si non, pour quelles raisons ?
  7. Pour les banques qui se sont rendues punissables aux Etats-Unis, quelles seraient les conséquences financières de la déductibilité fiscale en termes de pertes de recettes pour le canton et les communes ?

Je remercie d’avance le Conseil d’Etat pour ses réponses.

Julien Eggenberger, député PS

Politique du canton de Vaud en matière d’exonérations fiscales 

Résumé d’une intervention au Grand Conseil du 19 juin 2012

Certains nous disent que les exonérations fiscales ne coûtent rien à la collectivité publique. C’est évidemment faux ! Les collectivités publiques prises dans leur globalité sont les premières perdantes de cette concurrence fiscale. Devons-nous nous satisfaire de notre rapacité et offrir à des entreprises extraordinairement profitables des opportunités d’évasion fiscale ? D’autres craignent pour notre réputation. Mais est-ce cela qui est en jeu ? La vraie question n’est-elle pas celle de l’indécence de cette situation. De l’indécence de ces entreprises opportunistes, qui fuient leurs devoirs envers la collectivité ? De l’indécence d’un système politique qui s’est emballé sans aucune considération dans une course à l’opportunisme fiscal ? De l’indécence d’une politique qui refuse la plupart des avancées sociales au nom de la sobriété financière mais qui octroie sans réel contrôle des exonérations fiscales sur des sommes conséquentes ? De l’indécence enfin d’une situation injustifiable, qui voit l’essentiel des contribuables s’acquitter de leurs impôts avec le sens de leurs responsabilités vis-à-vis des collectivités et quelques privilégiés profiter du système ?

La fiscalité est le cœur d’un système de redistribution des richesses qui permet à la société de fonctionner. Le système des exonérations fiscales tel qu’il a été pratiqué dans notre canton ne répond plus à l’esprit de notre Constitution, qui prévoit que chacun soit traité selon ses capacités pour le calcul de sa contribution à la société. Nous espérons que ces événements soient enfin rendus publics et permettent de remettre en cause cette politique de soustraction fiscale. La légalisation de cette soustraction fiscale doit cesser. Le temps d’une politique industrielle réfléchie et transparente est venu.