Auteur/autrice : jeggenbe

Motion : objectif : zéro primo infection VIH dans le canton de Vaud

Motion déposée au Grand Conseil du canton de Vaud le 15 décembre 2021

Apparu il y a 40 ans, le VIH continue à infecter de nouvelles personnes chaque année. Progressivement, le nombre de nouvelles infections baisse, sans toutefois connaître une inflexion suffisante laissant entrevoir une fin. Si la Suisse comptait plus de 1500 cas positifs par année dans les années 1990, le nombre est passé sous les 500 récemment. Par ailleurs, la pandémie de covid-19 a eu un impact certain sur la lutte contre le VIH, notamment en ralentissant les activités de dépistage et les découvertes de nouvelles infections.

Grâce aux importants progrès médicaux, de prévention et la mise sur pied de structures spécialisées (checkpoint Vaud, Profa, …), l’espérance de vie n’est que peu diminuée par une infection, mais au prix d’un traitement médicamenteux et d’impacts psychosociaux. Cela ne peut constituer un oreiller de paresse, tant l’opportunité d’une éradication de ce virus est à portée de main. En 2011 déjà l’ONUSIDA indiquait que l’ambition de parvenir à zéro infection était atteignable d’ici 2030, pour autant qu’une révolution des outils de prévention soit entreprise. En effet, la prévention ne peut se limiter à inciter à modifier les comportements à risques. A titre d’exemple, la ville de San Francisco a réussi à atteindre une baisse de 60% des nouvelles infections en 10 ans, grâce à un programme de santé publique alliant gratuité des moyens de prévention et des dépistages, un meilleur accès aux traitements et la lutte contre la stigmatisation des personnes infectées. En réduisant le nombre d’infections, on économise aussi les coûts très importants des traitements qui devront être pris toute la vie et des impacts possibles et onéreux en termes de santé mentale par la stigmatisation sociale de vivre avec le VIH.

Une stratégie efficace doit combiner information, prévention large et adaptée aux différents publics, un système performant permettant un diagnostic le plus précoce possible, une prise en charge efficace dès le diagnostic connu et la lutte contre la discrimination et la stigmatisation des personnes infectées. Le dispositif vaudois existe et contribue activement à lutter contre ce virus sur tous ces aspects. Il reste malgré tout des améliorations possibles.

  1. Développer le système de diagnostic précoce pour éviter les infections secondaires

Une personne diagnostiquée est prise en charge par traitement antiviral. Si celui-ci est pris efficacement, cette personne devient indétectable, elle ne transmet plus le VIH. Il y a donc un intérêt prépondérant à identifier le plus vite possible les infections. La grande majorité des infections sont le résultat d’une contamination par une personne ne connaissant pas son statut sérologique. Il ne s’agit donc pas d’une question qui concerne seulement la personne concernée, mais bien un enjeu de santé publique. Le système de subventionnement des tests VIH et d’autres IST en vigueur dans le canton a été revu en 2018 en réponse à une motion de l’ancienne membre du Grand Conseil Brigitte Crottaz (16_MOT_087). Le Conseil d’État reconnaissait alors que la politique de dépistage menée était bien en deçà de celles pratiquées dans de nombreuses autres régions. Malheureusement, il apparaît que le système mis en place en 2018 doit être revu et la loi sur la santé publique modifiée afin de lever les obstacles à un diagnostic le plus précoce possible. Finalement, il convient de relever l’intérêt d’élargir l’accès au dépistage en sortant des sentiers battus (dépistage « hors les murs ») comme le démontre une étude publiée dans la Revue médicale suisse en 2020[1]. Deux axes pourraient être poursuivis : une prescription plus systématique et des gratuités ciblées, car il semble que les coûts soient rédhibitoire pour certaines personnes. Une comparaison avec les dispositifs en place dans certaines régions du monde qui connaissent des résultats probants devrait permettre d’adapter le modèle pratiqué dans notre canton.

  1. La PrEP : un nouvel outil efficace évitant les primo infections

Ces dernières années, la PrEP, la prophylaxie pré-exposition au VIH, a démontré son efficacité comme outil complémentaire de réduction des risques de transmission du VIH. La PrEP s’adresse aux personnes séronégatives et consiste en un médicament à prendre tous les jours en continu ou par phase et qui évite les contaminations. Le principe de la prévention médicamenteuse n’est pas spécifique au VIH, mais existe aussi par exemple pour la malaria ou pour réduire le risque de maladies cardiovasculaires (statines). Dans les régions qui ont décrété la prise en charge des coûts de ce traitement (France, Luxembourg, Norvège, de nombreuses régions ou villes américaines,…), l’effet est confirmé. C’est pourquoi l’Organisation mondiale de la santé recommande ce traitement depuis septembre 2015, au moins pour les publics les plus à risque . Le coût de la PrEP, particulièrement élevé en Suisse, et sa non-prise en charge par l’assurance de base représentent une barrière à son accès pour une majorité de la population qui pourrait en bénéficier. Dans ce contexte, les résultats de l’étude SwissPrEPared, qui comptent actuellement plus de 4000 personnes sur l’ensemble de la Suisse, devront être suivis avec attention.

  1. Mobiliser tout le système de santé

Une part importante du travail de prévention et de diagnostic est réalisée dans des centres dédiés. Ces derniers réalisent un travail remarquable et leur contribution est déterminante dans le combat contre cette pandémie. De leur côté, les médecins généralistes occupent une place centrale dans le dispositif de santé publique. Ils et elles disposent d’une position privilégiée au plus près de leur patient-e, en étant notamment les mieux placés pour établir un profil des risques grâce au lien de confiance établi. Leur rôle pourrait être renforcé, par exemple en promouvant activement certains outils de lutte contre la pandémie. Cela nécessite l’élaboration d’une stratégie permettant de fournir un cadre clair (dépistage plus systématique, identification des profils à risques, promotion de la PrEP aussi en cabinet,…) et un engagement des sociétés médicales et professionnelles auprès de leurs membres dans ce sens. Par ailleurs, dans les services d’urgence, une mobilisation sur cette question semble aussi possible. Une étude[2] menée en 2016 aux urgences du CHUV montrait alors que, malgré les directives visant à systématiser le dépistage pour les publics à risques, seulement 1% des consultations aboutissaient à un dépistage. La même étude indiquait que la moitié des patient-e-s en Suisse sont malheureusement diagnostiqués à un stade avancé de l’infection VIH alors qu’ils-elles avaient souvent consulté leurs médecins ou un service d’urgences dans les un à trois ans précédant leur diagnostic pour des tableaux cliniques signant soit une primo-infection ou une infection chronique. Cette réalité implique que ces personnes ont pu en infecter d’autres dans l’intervalle et que la prise en charge par traitement rétroviral peut se compliquer.

  1. Lutter contre la stigmatisation des personnes séropositives

Nous ne sommes pas toutes égales / tous égaux face au VIH. L’épidémie touche de façon disproportionnée certains groupes de la population, notamment les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes, les personnes trans ou encore celles nées dans un pays à forte prévalence. Les personnes infectées par le VIH souffrent encore malheureusement de discriminations et de stigmatisation. Beaucoup peine à comprendre qu’une personne infectée, diagnostiquée et prise en charge, ne constitue pas une menace pour la santé. En plus d’être moralement problématique, les discriminations et la stigmatisation sont aussi contre productives et constituent des obstacles à la lutte contre cette maladie. Les réactions de stigmatisation (mise à l’index, culpabilisation, mauvais traitement, refus d’emploi, d’assurance, de soins, …) entravent les efforts de prévention et de traitement, aggravant l’impact de l’épidémie. Par ailleurs, elles affaiblissent le soutien familial et communautaire pourtant indispensable dans une telle situation. Lutter contre la stigmatisation passe, notamment, par informer le public et les professionnel-le-s du fait qu’une personne séropositive au VIH sous traitement ne peut pas transmettre le VIH afin d’éviter les situations d’exclusion ou l’application de mesures d’hygiène ou de distanciation inutiles. Il s’agit aussi de s’assurer qu’aucun accès différencié à des prestations n’existe et que les éventuelles situations de discrimination en raison du statut sérologique soient sanctionnées. Plus globalement, une communication sur les vécus des personnes séropositives permettrait peut-être de thématiser ces enjeux et de lutter contre les représentations négatives.

Les signataires de cette motion demandent au Conseil d’État de proposer un changement de la loi sur la santé publique (LSP – article 28 alinéa 4 notamment), qui définirait une stratégie cantonale visant à éradiquer le VIH d’ici 2030. Parmi les mesures à étudier, figurent les modalités d’un élargissement du système de dépistage du VIH et de son accessibilité, le lancement d’un programme cantonal de distribution de la PrEP ciblé sur les publics à risques et un plan de mobilisation de tout le système de santé et la lutte contre la stigmatisation des personnes séropositives.

Julien Eggenberger, député au Grand Conseil et 45 cosignataires

[1] https://u.pcloud.link/publink/show?code=XZEow0XZTGEFlemrSoXfSnTu3zaobVJqz77X

[2] Ibid.

Acceptation de la motion visant à interdire les thérapies de conversion

Intervention dans le débat le 15 décembre

Les « thérapies de conversion », c’est-à-dire les pratiques qui visent à modifier l’orientation affective et sexuelle ou l’identité de genre, reposent sur le principe erroné que les personnes LGBTIQ+ sont malades et nécessiteraient des soins ou qu’elles sont dans l’erreur. Or ces pratiques sont profondément nuisibles et à l’origine de graves souffrances comme les travaux de la commission l’ont montré. Au-delà de l’atteinte à la personnalité et de la vision problématique qu’elles promeuvent quant à l’orientation ou l’identité d’une personne, elles provoquent des traumatismes psychologiques et physiques qui laissent de graves séquelles et violent les droits humains. Parmi les ravages que produisent ces pseudo-traitements figurent une perte considérable d’estime de soi, l’anxiété, un état dépressif, un isolement social, des problèmes relationnels, une haine de soi, de la honte, de la culpabilité, un dysfonctionnement sexuel, des idées suicidaires, des tentatives de suicide et des symptômes de trouble post-traumatique.

Plusieurs pays ont récemment interdit ces pratiques. Des démarches identiques sont en cours dans une dizaine de cantons, à des stades divers. Dans notre canton aussi malheureusement, et les informations que le département a pu nous donner, et je l’en remercie, le démontrent : cette question est un enjeu. La nécessité est donc là. Nous avons aujourd’hui l’occasion d’avancer pour rapidement régler cette question. Car, en attendant, ce sont surtout les jeunes, vulnérables, en période de questionnement ou de coming out, qui restent exposées à ces programmes. Avant de conclure, je profite de cette intervention pour remercier de manière appuyée les membres de la commission et sa présidente pour le soin apporté à ce sujet et la Cheffe de département et ses services pour le travail préparatoire qui a été très utile. Je vous remercie d’avance du soutien que vous manifesterez à cette motion.

Agir contre les démonstrations publiques de discrimination et de haine ! (Développement)

Développement de l’interpellation déposée au Grand Conseil du canton de Vaud le 28 septembre 2021

Le 12 septembre dernier, Le Matin dimanche relatait le dernier agissement d’Alain Soral. Ce résident de notre canton depuis une courte période a renouvelé des paroles hostiles et dégradantes envers les personnes LGBTIQ+ dans un contexte public, ce qui s’ajoute à des prises de position sexistes, racistes ou encore antisémites. Par respect pour toutes les personnes, nous renonçons à relayer ici ces paroles outrancières.

Cela dit, il se trouve que l’article 261bis du Code pénal réprime les appels à la haine et à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance ethnique, religieuse ou de leur orientation sexuelle. Il ne s’agit donc pas d’opinions politiques, quoi qu’en pensent certaines et certains. Pour rappel, dans un contexte plus large, j’ai déposé le 2 mars dernier une interpellation sur la mise en œuvre de l’élargissement de cette norme pénale (21_INT_33). Cet objet n’a pas encore reçu de réponse, à ce jour. Notre canton est ouvert et tolérant, mais cela ne doit pas se retourner contre la population ou l’une de ses communautés. Aucune tolérance ne peut être manifestée envers celles et ceux qui la méprisent, envers celles et ceux qui formulent des appels au racisme, à la haine antisémite ou homophobe. Dès lors, nous remercions d’avance le Conseil d’Etat pour ses réponses.

Agir contre les démonstrations publiques de discrimination et de haine !

Interpellation déposée au Grand Conseil du canton de Vaud le 21 septembre

Le 12 septembre, le Matin Dimanche relatait le dernier agissement d’Alain Soral. Ce dernier, résidant dans le canton de Vaud depuis une courte période, a renouvelé des paroles hostiles et dégradantes envers les personnes LGBTIQ+ dans un contexte public, sous la forme d’interventions filmées sur la plateforme de l’organisation Égalité et Réconciliation. Ceci s’ajoute à des prises de position sexistes, racistes ou encore antisémites, par ailleurs régulièrement dénoncées par la CICAD. Par respect pour les personnes, nous renoncerons ici à relayer ces paroles outrancières. Ceci dit, il se trouve que l’article 261bis du Code pénal réprime les appels à la haine et la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle.

Selon les éléments communiqués aux médias, ni la police, ni le Ministère public ne se sont autosaisis de cet épisode. Un dépôt de plainte a été communiqué par la journaliste attaquée et l’organisation Pink cross a formulé une dénonciation le jeudi 16 septembre. Or ces faits sont graves. Ils impactent la cohésion sociale, constituent une forme de discrimination et ont des conséquences directes sur la santé mentale et le bien-être, notamment chez les jeunes LGBTIQ+. Ne pas réagir constitue une forme d’encouragement à l’impunité et à la banalisation de ces propos outranciers, or les autorités ont pour mission d’assurer la protection des personnes, et en particulier lorsqu’une minorité se retrouve particulièrement attaquée.

Pour rappel, dans un contexte plus large, le 2 mars 2021, nous interpelions le Conseil d’Etat au sujet de la mise en œuvre de l’élargissement de cette norme pénale à l’orientation sexuelle (21_INT_33 « Un an après, il est temps d’agir contre les crimes LGBTIQ-phobes ! »), objet encore sans réponse à ce jour.

Notre canton est ouvert et tolérant, mais cela ne doit pas se retourner contre la population ou l’une de ses communautés. Aucune tolérance ne peut être manifestée envers celles et ceux qui la méprise, aucune tolérance envers celles et ceux qui formulent des appels au racisme, à la haine antisémite ou homophobe. Dès lors, nous formulons les questions suivantes :

  1. Quelle est l’appréciation du Conseil d’État sur les interventions d’Alain Soral concernant les personnes LGBTIQ+ et/ou de confession juive ?
  2. Le Conseil d’État estime-t-il qu’une réaction est requise, notamment est-ce que des poursuites seraient légitimes ?
  3. Quels sont les possibilités du Conseil d’État permettant d’inciter le Ministère public à ouvrir une enquête ?
  4. Quelles conditions doivent être remplies afin que le Ministère public s’autosaisisse du dossier dans ce type de cas ?
  5. De manière plus générale, quelles mesures sont envisagées à l’encontre d’Alain Soral ?
  6. Au-delà du dépôt de plainte ou de la dénociation, quelles mesures sont envisagées afin de réprimer les prises de paroles publiques qui enfreindraient l’article 261bis du code pénal ?

Intervention au Grand Conseil « Un an après, il est temps d’agir contre les crimes LGBTIQ-phobes ! »

Intervention au Grand Conseil dans le cadre du développement de l’interpellation « Un an après, il est temps d’agir contre les crimes LGBTIQ-phobes ! »

Les personnes LGBTIQ+ sont régulièrement victimes d’agressions physiques et psychologiques en raison de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de l’expression de leur genre. Ces agressions ont de lourdes conséquences physiques et psychologiques pour les victimes, elles accablent aussi l’ensemble des personnes LGBTIQ+ en provoquant également des changements de comportement, par exemple en faisant hésiter de pouvoir vivre normalement dans l’espace public. Ce constat doit nous interpeler.

Le 9 février 2020, la Suisse a dit OUI à 63% à la protection des personnes LGBTIQ+ contre la haine, les Vaudoises et les Vaudois soutenant cette extension de la norme pénale à la discrimination homophobe à plus de 80%. La loi ne suffit pas et des mesures concrètes sont nécessaires. Si la population a donné un signal clair, les mesures de sensibilisation et de prévention font toujours défaut. Les autorités politiques ne peuvent pas rester inactives et doivent agir contre la discrimination et l’hostilité envers les personnes LGBTIQ+.

Dans sa réponse au postulat du Conseiller national Angelo Barrile (PS / ZH) « Plan d’action national contre les crimes de haine anti-LGBTIQ », le Conseil fédéral relève que les autorités compétentes étant cantonales et communales, il appartient aux autorités organisant, notamment, les corps de police de mettre en œuvre cette nouvelle norme pénale et de les compléter par « des mesures adéquates de sensibilisation, de prévention, d’intervention et de monitorage ».

Il appartient donc aux autorités politiques en charge de la sécurité publique de se saisir de ce thème et d’agir. C’est pourquoi notre groupe souhaiterait connaître les dispositions prévues par le Conseil d’Etat. Comme la politique de sécurité publique n’est pas seulement une prérogative cantonale, des élues et des élus socialistes interviennent en ce moment devant les conseils intercommunaux de police régionale et devant les Conseils communaux des principales villes vaudoises.

Intervention au Grand Conseil: « Pour l’interdiction des “thérapies de conversion“ »

Développement de la motion « Pour l’interdiction des “thérapies de conversion“ » devant le Grand Conseil le mardi 9 mars 2021.

« Tu deviendras hétéro mon fils » Dans ce documentaire réalisé par Caroline Benarrosh et diffusé cet automne, des récits éclairants sont relayés. Un jeune à qui on impose de lire des récits de viols de jeunes adolescentes par des hommes âgés. Une jeune femme qui doit subir sous hypnose de regarder des images visant à susciter le désir d’être pénétrée. Des jeunes gens qui sont inscrits à des cours de restauration de l’identité, basé notamment sur la perspective d’une réconciliation avec une orientation et une identité correspondant au à la norme hétérosexuelle.

Assimilée par un rapport du Conseil des droits de l’homme de l’ONU à des actes de torture, les « thérapies de conversion » sont « intrinsèquement discriminatoires, cruelles, inhumaines et dégradantes et selon la sévérité de ces pratiques, de la souffrance, de la douleur physique ou mentale qu’elles infligent à la victime, elles peuvent être assimilées à des actes de torture. » Elles partent du principe que les personnes d’orientations affectives et sexuelles diverses ou dont l’identité de genre ne correspond pas à celle qui leur a été assignée à la naissance seraient déviantes et inférieures, sur le plan moral, spirituel ou physique, et devraient donc changer leur orientation ou leur identité pour y remédier.

Parmi les conséquences délétères de ces thérapies, on peut relever un dégoût de soi et de son orientation sexuelle et affective, de l’anxiété, une dépression avec des idées suicidaires, des troubles sévères de la sexualité, un échec scolaire pour les adolescents, des situations conjugales extrêmement douloureuses lorsque la personne est encouragée à former un couple hétérosexuel et/ou contrainte à se marier. Ces pratiques sont d’une extrême violence et ne sauraient entrer dans le cadre de la liberté d’expression ou dans celle de la liberté de conscience et de religion tant elles induisent de la souffrance.

Il faut en finir avec les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle et affective ou l’identité de genre d’une personne car elles constituent des atteintes graves à la personnalité et provoque des souffrances importantes. Afin de protéger les mineurs et toutes les personnes de ces actions, une interdiction doit être prévue par la loi.

« Je pense aux hommes, je suis désolé » ainsi s’exprime Jared Eamons dans le film « Boys erased » réalisé par Joel Edgerton en 2018 et relatant l’histoire vraie d’une jeune personne contrainte par sa famille à suivre une thérapie de conversion visant à le contraindre à changer son orientation sexuelle et affective. C’est pour les Jared et toutes et tous les autres que nous devons agir.

Chacun et chacune doit pouvoir vivre dans notre canton dans le respect de son orientation et de son identité. C’est aussi simple que cela.

Au nom des 42 membres du Grand Conseil signataires de cette motion, je me réjouis de continuer cette discussion en commission.


Le texte de la motion:

https://www.julien-eggenberger.ch/pour-linterdiction-des-therapies-de-conversion/

Il y a une année: la Maison du Peuple fêtait sa rénovation!

Une soirée d’inauguration pour clôturer trois ans de travaux et poursuivre la vocation de la Maison du Peuple depuis sa création.

Plus de 100 personnes étaient réunies le 5 mars 2020, autour des personnalités qui ont façonné la Maison du Peuple au cours des années, et pour honorer celles et ceux qui ont mené la rénovation de son aile sud.

Retrouvez ici les images de cette belle soirée, le discours du président du Cercle ouvrier, Julien Eggenberger, ainsi que le reportage de LaTélé du 10 mars 2020.

Surtout, découvrez ici le film réalisé par Adian Blaser pour l’occasion et qui témoigne de l’importance de la Maison du Peuple pour les mouvements sociaux dans le Canton de Vaud.

La suite sous:

https://lamaisondupeuple.ch/il-y-a-une-annee-la-maison-du-peuple-fetait-sa-renovation/

 

Pour l’interdiction des “thérapies de conversion“

Motion déposée au Grand Conseil du canton de Vaud le 2 mars 2021

Un homme homosexuel menacé de mort pour qu’il épouse une femme et ait des enfants. Une femme lesbienne à qui on fait subir des séances d’hypnose comportant des messages à caractère sexuel visant à habituer son corps à la pénétration masculine. Un traitement psychique pour « guérir » la transidentité. Des exorcismes visant à « chasser le démon de l’homosexualité », des sévices sexuels, des viols, des traitements hormonaux, des électrochocs, l’excision de femmes lesbiennes…  ou encore, plus couramment aujourd’hui, des « thérapies » visant à restaurer une identité conforme à la norme hétérosexuelle et cisgenre, ou à défaut à fournir un accompagnement vers une « vie chaste et normative ». Parmi elles, la thérapie par aversion qui consiste à soumettre une personne à des sensations négatives, douloureuses ou angoissantes alors qu’elle est exposée à un certain stimulus lié à son orientation affective et sexuelle et/ou à son identité de genre. Autant de pratiques prétendant changer l’orientation affective et sexuelle et/ou l’identité de genre d’une personne. Elles n’atteignent jamais l’effet escompté et détruisent la vie psychique et sexuelle des personnes qui en sont la cible. Par simplification, l’usage nomme ces pratiques « thérapies de conversion », bien qu’elles n’y ressemblent que rarement.

Trois approches extrêmes fondent les thérapies de conversion : psychothérapeutiques (la diversité sexuelle ou de genre découle d’une éducation ou d’une expérience anormale), médicales (orientation affective et sexuelle et l’identité de genre sont la conséquence d’un dysfonctionnement biologique) et confessionnelles (les orientations affectives et sexuelles et les identités de genre différentes ont quelque chose de fondamentalement mauvais et « contre nature »).

Un rapport du Conseil des droits de l’homme de l’ONU[1] assimile les « thérapies de conversion » à des actes de torture et appelle à leur interdiction. Ces pratiques sont « intrinsèquement discriminatoires, cruelles, inhumaines et dégradantes et selon la sévérité de ces pratiques, de la souffrance, de la douleur physique ou mentale qu’elles infligent à la victime, elles peuvent être assimilées à des actes de torture. » Elles partent du principe que les personnes d’orientation affectives et sexuelle diverse ou d’identité de genre variante seraient déviantes et inférieures, sur le plan moral, spirituel ou physique, et devraient donc changer leur orientation ou leur identité pour y remédier.

Parmi les conséquences délétères de ces thérapies, on peut relever[2] un dégoût de soi et de son orientation sexuelle et affective, de l’anxiété, une dépression avec des idées suicidaires, des troubles sévères de la sexualité, un échec scolaire pour les adolescents, des situations conjugales extrêmement douloureuses lorsque la personne est encouragée à former un couple hétérosexuel et/ou contrainte à se marier. Ces pratiques sont d’une extrême violence et ne sauraient entrer dans le cadre de la liberté d’expression ou dans celle de la liberté de conscience et de religion tant qu’elles induisent de la souffrance. Elles enfreignent les droits de l’enfant lorsqu’elles sont imposées par les parents et dépossèdent la personne, alors vue comme une patiente, de son libre arbitre et de son consentement.

La situation est d’autant plus grave pour les mineurs qui sont en droit d’attendre de la protection et une attitude bienveillante de la part des adultes garant de leur développement et non pas une remise en cause de leur identité.

En Europe, depuis le début des années 2000, apparaissent, sous l’impulsion d’associations chrétiennes intégristes, des programmes de conversion. Suite aux mesures prises en Allemagne (interdiction des thérapies de conversion pour les mineurs), les principales organisations les pratiquant ont quitté ce pays pour s’établir en Suisse. Ainsi, et par exemple, la Bruderschaft des Weges (« Confrérie du Chemin ») et l’Institut für dialogische und identitätsstiftende Seelsorge und Beratung (« Institut de pastorale et de conseil pour la restauration identitaire par le dialogue ») ont annoncé leur enregistrement en tant qu’association suisse au premier semestre 2020[3].

La Suisse est donc particulièrement concernée. D’une part, les programmes à vocation religieuse[4], y compris dans le canton de Vaud (par exemple, l’Église évangélique Lazare de Bussigny qui proposait des cours de « restauration de l’identité » [5]). D’autre part, des personnes agissant dans le domaine thérapeutique ou médical : c’est, par exemple, le cas avec l’information communiquée début juillet 2020 d’un psychiatre du canton de Schwyz qui a fait reconnaître des thérapies de conversion comme psychothérapie médicale et donc payées par l’assurance maladie. On se rappelle aussi la révélation, en 2018, d’un médecin et homéopathe pratiquant dans les cantons de Genève et de Vaud et qui proposait de « guérir de l’homosexualité ».[6] Dans la situation juridique actuelle, il semble qu’il n’y a pas de sanctions possibles à l’encontre de ces médecins, que ce soit une amende ou même une interdiction professionnelle, bien qu’ils aient violé l’éthique professionnelle. Ces cas ne sont pas isolés, puisqu’on estime que 14 000 personnes en Suisse sont concernées par les thérapies de conversion[7]. Ces chiffres sont très probablement sous-évalués aux vues des moyens financiers importants et du réseau international de ces structures comme : Courage Internationnal, Desert stream living water, Torrent de vie, Exodus Internationnal

L’Allemagne, l’Autriche, Malte, le Brésil, l’Argentine, plusieurs états américains et provinces canadiennes ont déjà interdit ces thérapies, et d’autres pays (la Grande-Bretagne notamment) y songent.[8]

Cet exposé sommaire de la situation montre la nécessité d’en finir avec les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle et affective ou l’identité de genre d’une personne et cela passe par leur interdiction.

Les membres du Grand Conseil soussignés demandent par voie de motion à ce que le Conseil d’État propose une modification législative afin d’interdire les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle et affective ou l’identité de genre d’une personne.

[1] https://www.ohchr.org/fr/NewsEvents/Pages/ConversionTherapy_and_HR.aspx

[2] https://ilga.org/downloads/ILGA_World_Curbing_Deception_world_survey_legal_restrictions_conversion_therapy.pdf

[3] https://360.ch/suisse/55830-la-suisse-refuge-pour-les-adeptes-des-therapies-de-conversion/

[4] https://www.swissinfo.ch/fre/homosexualité_des-groupes-religieux-encouragent-les–thérapies-de-conversion-/44750602

[5] https://360.ch/suisse/19106-les-ex-gays-ont-aussi-leur-reseau-en-suisse/

[6] https://360.ch/suisse/44814-lhomosexualite-un-symptome-a-traiter-selon-un-homeopathe-lausannois/

[7] Émission « Mise au point », RTS, 15 septembre 2019, https://www.rts.ch/play/tv/mise-au-point/video/therapies-de-conversion?urn=urn:rts:video:10710481

[8] Genre: vers une interdiction des thérapies de conversion dévastatrices et trompeuses, Laure Dasinières, Heidi.news, 17 août 2020

Un an après, il est temps d’agir contre les crimes LGBTIQ-phobes !

Interpellation déposée au Grand Conseil du canton de Vaud le 2 mars 2021

Les personnes LGBTIQ+ sont régulièrement victimes d’agressions physiques et psychologiques en raison de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ou de l’expression de leur genre. D’après un rapport de l’organisation Pink Cross, en 2019, le nombre de crimes de haine signalés à la « LGBTQ Helpline » a drastiquement augmenté. Plus d’un signalement par semaine, alors que la très grande majorité des agressions n’est pas recensée. Environ une victime sur trois a subi de la violence physique. Ces agressions ont de lourdes conséquences physiques et psychologiques pour les victimes, elles accablent aussi l’ensemble des personnes LGBTIQ+ en provoquant également des changements de comportement, par exemple en faisant hésiter de pouvoir vivre normalement dans l’espace public.

Le 9 février 2020, la Suisse a dit OUI à 63% à la protection des personnes LGBTIQ+ contre la haine, les Vaudoises et les Vaudois soutenant cette extension de la norme pénale à la discrimination homophobe à plus de 80%. La loi ne suffit pas et des mesures concrètes sont nécessaires. Si la population a donné un signal clair, les mesures de sensibilisation et de prévention font toujours défaut. Les autorités politiques ne peuvent pas rester inactives et doivent agir contre la discrimination et l’hostilité envers les personnes LGBTIQ+.

Dans sa réponse au postulat du Conseiller national Angelo Barrile (PS / ZH) « Plan d’action national contre les crimes de haine anti-LGBTIQ », le Conseil fédéral relève que les autorités compétentes étant cantonales et communales, il appartient aux autorités organisant, notamment, les corps de police de mettre en œuvre cette nouvelle norme pénale et de les compléter par « des mesures adéquates de sensibilisation, de prévention, d’intervention et de monitorage ».

Afin de faire le point sur les mesures prises par le canton pour mettre en œuvre cette nouvelle norme pénale, nous avons l’honneur de poser les questions suivantes :

  • Comment est prise en charge et coordonnée la mise en œuvre de cette nouvelle norme au sein de l’État de Vaud ?
  • Quelles mesures de sensibilisation et de prévention contre l’hostilité envers les personnes LGBTIQ+ s’adressant aux jeunes en formation, au grand public et aux possible auteur-e-s ont été développées ?
  • Quelles mesures ont été prises afin de soutenir et de protéger les victimes (en garantissant notamment l’accès à l’aide aux victimes pour des soins et un constat) ?
  • Quelles mesures ont été prises pour faciliter l’accès à la justice, notamment afin d’instruire et de documenter les circonstances aggravantes ?
  • Quelles mesures ont été prises par la police cantonale pour prendre en compte cette nouvelle norme pénale ? En particulier, quelle formation a été donnée aux membres des corps de police et quelles consignes ont été transmises ?
  • Le cas échéant, le Conseil d’État estime-t-il nécessaire de renforcer ce dispositif ? Si oui, par quelles mesures ?